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Saint-Jean-Bosco
Eglise Saint-Jean-Bosco
79, rue Alexandre Dumas
75020 Paris
Métro Alexandre Dumas, Avron, Buzenval
Visites ACF/Paris : 01 43 70 29 27
Située dans l’ancien village de Charonne, et plus précisément dans le quartier de la Réunion1, peuplé de nombreux immigrés italiens, dits ritals à l’époque, l’église Saint-Jean-Bosco est le 60e des Chantiers du Cardinal2. Grâce à la ténacité du Père Siméoni3, elle s’élève sur le terrain de l’ancien patronage Sainte-Anne, créé en 1845 par les religieux de Saint-Vincent-de-Paul et confié en 1921 aux Salésiens par son directeur, un des neveux de Frédéric Ozanam4.
Le projet, très ambitieux, conçu par l’architecte Dumitru Rotter5, démarre en 1933, un an avant la canonisation de Jean Bosco, éducateur de la jeunesse populaire.
Au départ, il comprenait l’église entourée de bâtiments de quatre ou cinq niveaux sur sous-sol et sur arcades formant cloître autour de deux cours. Il devait regrouper les espaces fonctionnels de l’institution : écoles primaire, secondaire et professionnelle, internat, patronage, salle de sports…
Comme le montre la maquette du projet initial par Dumitru Rotter (archives de la maison provinciale de l’ordre des Salésiens, Paris)
Faute de financements, seule l’église sort de terre. Bien qu’inachevée, elle est bénie et ouverte au culte en 19376. René Rotter, le fils de l’architecte, en achève les travaux en 1943. Elle constitue le dernier exemple parisien d’église à grand décor, de style Art Déco7, associant statuaire, peintures, mosaïques et vitraux.
A l’extérieur, se dresse la façade en béton revêtu d’un enduit blanc. Un escalier à deux niveaux et à double volée donne accès à l’église haute dévolue aux paroissiens et à l’église basse, ou crypte, dédiée à sainte Anne et destinée, à l’origine, aux élèves.
Elle est surmontée d’un clocher de 53 mètres de hauteur8, phare pour le quartier.
Les deux tourelles l’encadrant, percées de claustra ornés de verres colorés, abritent des escaliers bénéficiant ainsi d’un éclairage naturel. Au centre de la balustrade supérieure, la statue de Georges Serraz9 représente Jean Bosco et un jeune disciple. Les portes en bronze, ornées de croix grecques rayonnantes en relief, sont de Raymond Subes10.
A l’intérieur, le décor chatoyant d’origine11 ornant la nef et le transept contraste avec la blancheur et la géométrie de l’extérieur.
En partie haute, la dalle portée par des consoles à pan coupé donne de la monumentalité à l’ensemble. En partie basse, l’emploi du marbre onyx en larges surfaces ou en granito12 sur les murs, les colonnes et les piliers, confère une note précieuse à l’espace tout en l’unifiant.
Dans la nef, le programme iconographique est mis en œuvre par Charles Mauméjean13, sous la direction de l’abbé Siméoni.
Dans les tribunes, les cartons des douze vitraux, de part et d’autre de la nef, sont de Charles Mauméjean. Leur réalisation revient à ce dernier pour les trois premières travées [côté entrée] et à Jean Gaudin14 pour les trois suivantes [côté chœur]. Entre voûte/ciel et sol/terre, les apôtres, piliers de l’Eglise : à gauche, Barthélemy, Jacques le Majeur, Thomas, André, Jean, Pierre ; à droite, Simon, Jacques le Mineur, Philippe, Jude, Matthieu et Paul.
Dans les bas-côtés, à hauteur d’œil, les vitraux de Gaudin sur des cartons de Mauméjean présentent des saints vénérés en France et à Paris : à gauche, le Curé d’Ars, saint Denis et à droite, saint Louis, sainte Geneviève, entre autres.
Dans les bas-côtés, à hauteur d’œil, les vitraux de Gaudin sur des cartons de Mauméjean présentent des saints vénérés en France et à Paris : à gauche, le Curé d’Ars, saint Denis et à droite, saint Louis, sainte Geneviève, entre autres.
Entre les autels latéraux et les confessionnaux où sont exposés des vêtements et des objets liturgiques datant de la création de la paroisse, Mauméjean a créé un chemin de croix en mosaïque. Très expressif, il se lit depuis la sacristie [à gauche du chœur], en passant par le fond de l’église, jusqu’à la chapelle dédiée à Marie-Dominique Mazzarello15 et à Dominique Savio16 [à droite du chœur].
Le transept gauche est dédié à Marie Auxiliatrice. Sa statue domine l’autel et se détache sur la mosaïque de Mauméjean évoquant son intercession lors de la bataille de Lépante (1571), de l’arrêt des Turcs devant Vienne (1683) et pour le retour du pape Pie VII au Vatican (1814).
Au-dessus de l’autel, le vitrail cruciforme d’Antoine Bessac17 : la Vierge, avec son manteau déployé18, présente les moments forts de la vocation de Jean Bosco (songe prémonitoire, fondation des Salésiennes…).
Au-dessus de la porte de la sacristie, la peinture murale de Mauméjean représente sainte Anne instruisant Marie.
Le transept droit est dédié à Jean Bosco. Sa statue domine l’autel et se détache sur la mosaïque de Mauméjean montrant les trois églises qu’il a fait bâtir19. Mgr Verdier, les sœurs et les pères salésiens, les jeunes ouvriers et apprentis qui l’entourent évoquent son charisme et son séjour à Paris en 1883.
Au-dessus de l’autel, le vitrail de Bessac : le Sacré Cœur, avec son manteau déployé18, présente les étapes de Jean Bosco vers la sainteté (épreuve de la maladie, canonisation, accueil au ciel par Pie IX).
Au-dessus de l’entrée de la chapelle votive : la peinture murale de Mauméjean représente Marguerite Occhiena Bosco, éduquant son fils Jean.
Dans le chœur, la verrière centrale célèbre Jean Bosco, entouré d’anges, reçu au ciel par Marie. De part et d’autre : les Noces de Cana [à gauche], premier miracle de Jésus, et la Cène [à droite], dernier repas de Jésus où il institua l’Eucharistie (cartons de Mauméjean). Les deux vitraux en lancettes, associées aux quatre évangélistes20, retracent les origines de l’œuvre salésienne.
Dans les pans coupés du voûtement, dans l’éclairage rasant du bandeau vitré, la méditation du Rosaire : celle des Mystères joyeux et douloureux21 de part et d’autre de la nef ; celle des Mystères glorieux dans le chœur.
Dans les caissons du plafond : les Litanies de la Vierge [nef] suivies de l’Agneau vainqueur [avant-chœur] et de la Trinité [à l’aplomb de l’ancien maître autel] : l’Esprit Saint déploie ses ailes autour du Père et du Fils, aux bras grands ouverts.
Sur la cuve de la chaire à prêcher, les tableaux en mosaïque de Charles Mauméjean, insérés dans l’onyx, illustrent l’Ancienne Alliance réalisée par le Christ dans la Nouvelle Alliance22. De la nacre incrustée (hostie) et des cabochons de verre moulé ou taillé (grappe de raisin) retiennent le regard.
Dans le bas-côté droit, le baptistère, remarquable pour son décor déployé sur le mur autour de la cuve et sa crédence en marbre onyx, nous rappelle le Baptême de Jésus dans le Jourdain dont les eaux se répandent sur le mur et sur le sol. En partie basse, le Massacre des Innocents [à gauche] et le Martyre des jeunes saints Donatien et Rogatien23 [à droite] évoquent le baptême de sang et le baptême de désir.
Paul Kiss24 est l’auteur de la grille qui clôt l’espace. Sur les médaillons en céramique de Luc et Marjolaine Lanel25, des scènes de la vie de Jean le Baptiste [face externe] répondent à des symboles bibliques [face interne].
L’ensemble du mobilier en bois, typique du style Art Déco, est resté en place : stalles du chœur, chaises de la nef, confessionnaux, l’orgue de tribune, inséré dans l’architecture par la maison Gloton et reconstruit par Bernard Dargassies26 en 1991.
Les statues de saint Antoine de Padoue et de sainte Thérèse de l’Enfant Jésus [à l’entrée de la nef], celles de saint Joseph et du Sacré Cœur [à l’entrée du chœur] sont de l’atelier de Georges Serraz et Yvonne Parvillée27.
L’église Saint-Jean-Bosco est un édifice unique par son décor qui magnifie et illustre l’œuvre fondée par Don Bosco que la communauté salésienne perpétue aujourd’hui au bénéfice de la jeunesse.
Saint Jean Bosco
Don Bosco (1815-1888)
Jean Bosco ou Don Bosco, est né dans le hameau de Castelnuovo d’Asti près de Turin, dans une famille de fermiers pauvres. Orphelin de père à deux ans, il est élevé par sa mère courageuse et pieuse, Margherita Occhiena28. A neuf ans, il fait un rêve déterminant pour sa vocation29. A l’adolescence, grâce à un chapelain de son village, il apprend l’italien et le latin, ce qui lui ouvre les portes du séminaire de Chieri près de Turin en 1834. Il finance ses études par divers métiers manuels.
En 1841, année de son ordination, Turin est en plein essor industriel. Frappé par la misère dans les faubourgs ouvriers de la ville, Jean Bosco se consacre à l’éducation des jeunes défavorisés pour leur ouvrir un meilleur avenir que celui de la prison. Avec l’aide de sa mère, il ouvre son premier foyer d’accueil au Valdocco, l’Oeuvre de l’Oratoire, conçu tant comme un centre de formation humaine et chrétienne que de loisirs. En 1854, il est rejoint par le jeune Dominique Savio16 dont la ferveur, la maturité morale et intellectuelle sont un modèle pour ses compagnons.
Don Bosco est animé par sa dévotion à Marie Auxiliatrice et son admiration pour saint François de Sales. C’est pourquoi, de 1846 à 1868, il édifie près de la chapelle et des bâtiments du Valdocco l’église Saint-François-de-Sales et la basilique Marie-Auxiliatrice qui abrite aujourd’hui sa châsse et celle de sainte Marie-Dominique Mazzarello. Don Bosco place son œuvre sous la protection de saint François de Sales30 en raison de sa douceur et de sa bonté. Ainsi, la pédagogie préventive et déjà professionnalisante de Don Bosco est fondée sur la fermeté, le soutien constant de la personne, le dialogue, l’amour bienveillant et la confiance mutuelle.
Les centres d’éducation se multiplient en Italie et, dès 1875, dans le monde. Religieux et laïcs de la Famille salésienne31 — du nom de saint François de Sales — y poursuivent aujourd’hui l’engagement de Don Bosco dans de nombreuses paroisses, écoles et œuvres sociales. Innovant pour son époque, Don Bosco était un prêtre humaniste qui se préoccupait d’action sociale. Son énergie et ses facultés de communicant lui ont permis de bénéficier de soutiens et de ressources utiles à l’éducation et à la promotion humaine et spirituelle de jeunes en situation de pauvreté et de risque.
Il est canonisé en 1934.
Notes :
1— Du nom de la rue réunissant le Haut et le Bas Charonne (commune annexée à Paris en 1860) peuplée d’ouvriers, d’artisans et de maraîchers. Au patronage, se mêlent français et immigrés.
2— Fondés en 1931 par Mgr Verdier pour assurer la présence de l’Eglise dans la périphérie de Paris, par la création de lieux de culte. Après la guerre de 1914-1918 et la crise des années 1930, ils contribuent à la lutte contre le chômage des ouvriers.
3— 1875-1953. Pilote du programme jusqu’en 1938, il est honoré du titre de Juste parmi les Nations (1997) pour avoir sauvé des jeunes juifs et leurs familles à Nice pendant l’occupation (1940-1944). Son portrait orne le devant de l’autel de la chapelle St-Joseph
(mosaïque de Mauméjean).
4— 1813-1853. Sensible à la pauvreté dans le Paris de l’ère pré-industrielle, il fonde en 1833 la Société de Saint-Vincent-de-Paul pour agir au service des démunis et en accord avec sa foi.
5— 1878-1937. Roumain, naturalisé français en 1907. Architecte de la ville d’Ajaccio (1909), du département de l’Aisne (1930), de la Banque de France (1929) et de pavillons pour l’Exposition de 1937.
6— La paroisse a été créée en 1938, par Mgr Verdier, afin de décharger celle de Saint-Germain-de-Charonne.
7— Succédant à l’Art Nouveau, aux formes souples et expansives, il tire son nom de l'Exposition des Arts décoratifs et industriels modernes de Paris (1925). Dépouillement, symétrie et géométrie dominent dans tous les arts. Les matériaux nobles servent un décor allégé, apprécié par une clientèle aisée.
8— Il est inspiré de N-D du Raincy (Seine-St-Denis), bâtie en 1923 par les frères Perret et première église en béton de France, remarquable par ses claustra colorés.
9— 1883-1964. Connu par ses œuvres monumentales en béton : le Christ-Roi (1934, Les Houches, Haute-Savoie), Notre-Dame-du-Sacré-Cœur-du- Mas-Rillier (1941, Miribel, Ain).
10— 1891-1970. L’un des plus célèbres ferronniers d’art de cette période. Il allie le fer forgé au bronze, au cuivre et à l’acier inoxydable, dès 1930. Il est l’auteur de décors à Saint-Louis de Vincennes, à Saint-Germain-des-Prés et à Sainte-Odile (Paris 6e et 17e).
11— Conservé dans sa presque totalité. L’église a été classée Monument Historique en 2011.
12— Revêtement de mur ou de sol en fragments de pierre, poli. Le marbre onyx est une variété de calcaire très fin.
13— 1888-1957. Charles (Carl) appartient à la 3e génération de peintres sur verre. Il s’installe rue Bezout (Paris 14e). Ses œuvres civiles ou religieuses comprennent aussi des fresques mosaïquées.
14— 1879-1954. En 1921, ce peintre sur verre invente un type de mosaïque faite de dalles de verre coulées et teintées dans la masse.
15— 1837-1881. Elle fonde en 1872 l'Institut des Filles de Marie-Auxiliatrice [sœurs salésiennes de Don Bosco]. Elle est canonisée en 1951.
16— 1842-1857. Issu d’une famille modeste, cet élève de Don Bosco fonde la Compagnie de l'Immaculée Conception (1856). Canonisé en 1954, il est le saint patron des jeunes.
17— 1898-1974. Reprend l’atelier de son père à Grenoble, spécialisé dans les vitraux pour la France et les missions. Dès 1927, il travaille pour les Salésiens (église ND-Auxiliatrice à Nice) avec une première série consacrée à la vie de Don Bosco.
18— Le geste de Marie avec son manteau symbolise la relation entre le monde divin et le monde humain.
19— Dont la basilique Marie-Auxiliatrice, élevée sur le lieu présumé du martyre (fin 3e s.) de Solutor, Adventor et Octavius, patrons de Turin, et révélé en songe à Don Bosco en 1844.
20— Dans la vision d’Ezéchiel (Ez 1, 1-14), les Pères de l’Eglise ont vu les symboles de Marc (le lion), de Matthieu (l’homme jeune), de Luc (le taureau) et de Jean (l’aigle).
21— Mystères médités pendant la récitation du chapelet [Rosaire] : annonce, naissance, présentation au Temple de Jésus [Mystères joyeux], passion du Christ [Mystères douloureux], résurrection du Christ, assomption de Marie [Mystères glorieux], baptême du Christ, miracle de Cana, Cène [Mystères lumineux, ajoutés par saint Jean-Paul II en 2002].
22— Les 12 pains [les 12 tribus d’Israël] pour l’Ancienne Alliance. L’Hostie pour la Nouvelle Alliance réalisée par le sacrifice du Fils.
23— Donatien et Rogatien sont encore adolescents lors de leur martyre, fin 304, à Nantes. Donatien est baptisé, mais Rogatien n’est que catéchumène. Premiers martyrs chrétiens de la ville, ils en sont les saints patrons.
24— 1886-1962. Fils d’un ferronnier, il quitte la Roumanie à 16 ans. Installé rue Delhomme (Paris 15e), il est connu pour sa technique du fer forgé martelé. Il crée des portes d’immeubles, des grilles d’intérieur ou monumentales et aussi du mobilier.
25— 1893-1965. Luc, dessinateur publicitaire et orfèvre chez Christofle, travaille avec son épouse Marjolaine (1897-1976), dès 1928. Il tourne, elle émaille. Remarqués aux expositions de 1931 et 1937, ils œuvrent pour des décorateurs (fontaines, églises, paquebots et villas ou... la salle-à-manger de l’Élysée à Paris 8e).
26— Né en 1954. Facteur d’orgues vosgien de renommée internationale.
27— 1895 [?]-1984 [?]. Participe à l’exposition internationale d’art sacré de Rome en 1934. Auteur du Saint Joseph et l’Enfant Jésus à Notre-Dame-des-Otages (Paris 20e).
28— 1788-1856. Veuve à 29 ans. Jean est le cadet de ses trois fils. Appelée «mamma Margherita» par les enfants du Valdocco.
29— Il essaye d’arrêter par la force des enfants qui jouent en blasphémant. Un Homme lui dit que douceur et charité feront d’eux des amis. Or une Dame arrive. Elle lui montre les enfants transformés en bêtes sauvages, puis en agneaux, et dit : Tu comprendras plus tard.
30— 1567-1622. Fondateur des Visitandines (1610), sa pensée spirituelle, Tout par amour, rien par force, se fonde sur l’importance de la personne, du contact individuel et du cœur. Don Bosco meurt en 1888, année où François de Sales est proclamé docteur de l’Eglise.
31— Ou Société de saint François de Sales (Turin en 1859). Au départ, elle comprend, entre autres, les laïcs de l’Association de Marie-Auxiliatrice (1869) et les Salésiens coopérateurs (1876) ainsi que des femmes consacrées, les Volontaires de Don Bosco (1917).
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©ACF/Paris, 2019.
Photos M. Caillon, F. de Franclieu, C. Niemkoff. Maquette Marie Beaudoin.