Exposition visible du mercredi au dimanche inclus, de 15h à 19h,
du 21 mai au 5 juillet 1992 à la Galerie Saint-Séverin.

Les artistes
Jean-Michel Alberola

Né en Algérie en 1953 de parents Français d’origine espagnole, Jean-Michel Alberola vit en France depuis 1962. Au début de sa carrière il dessine, en grand format, des personnages sans visage, en noir et blanc généralement, puis tombe malade et cesse de pratiquer. Lors qu’il reprend, il produit des compositions abstraites et colorées.

L’œuvre de Jean Michel Alberola est marquée par son interdisciplinarité. L’artiste se revendique peintre, sculpteur et cinéaste, et cherche à associer l’art et la parole. Ses sources d’inspiration sont majoritairement bibliques et mythologiques. Certaines de ses oeuvres sont d’ailleurs signées sous le pseudonyme « Actéon », figure mythologique dont il se sent proche.

Jean-Michel Alberola est représenté par la Galerie Templon à Paris. Il fait partie des trois artistes fondateurs de la Galerie Saint-Séverin, avec Pierre Buraglio et François Rouan.


Jean-Michel Alberola, Projet pour les vitraux de la cathédrale de Nevers, 1992. Centre Pompidou, Mnam-Cci, Paris / Bibliothèque Kandinsky / Photo Didier L’Honorey.

Gottfried Honegger

Né en 1917 à Zurich, Gottfried Honegger poursuit d’abord une carrière de graphiste publicitaire après des études à l’Ecole des arts appliqués de Zurich. Exerçant comme scénographe d’exposition dans les années 1930, comme à l’Exposition nationale de Zurich (1939), il commence, à cette même époque, à pratiquer la peinture de paysage cubiste.

Son travail reste marqué par le cubisme jusque dans les années 1950 où, après un voyage à New York, il débute sa production de monochromes abstraits dont les surfaces sont animées de motifs géométriques répétitifs, préfigurations de ses tableaux reliefs monumentaux. En 1960 il présente sa première exposition personnelle à New York, puis il s’installe à Paris où il utilise l’informatique pour créer des dessins programmés sur ordinateur.

Il expose de plus en plus fréquemment avant d’abandonner définitivement ses autres activités pour s’adonner entièrement à l’art.

François Rouan

Né à Montpellier en 1943, François Rouan vit et travaille dans l’Oise. Après des études à l’Ecole des Beaux-Arts de Paris, il s’engage, dans les années 1960, dans le mouvement Supports/Surfaces, puis se forme au tressage de divers matériaux.

L’artiste est pensionnaire de la Villa Médicis à Rome de 1971 à 1973. Il quitte finalement l’Italie en 1978 et expose dans la foulée au Musée Cantini, à Marseille (1978) et au Centre Pompidou à Paris (1983).

Il fait partie des trois artistes fondateurs de la Galerie Saint-Séverin, avec Pierre Buraglio et Jean-Michel Alberola.


François Rouan, Projet pour les vitraux de la cathédrale de Nevers, 1992.
Centre Pompidou, Mnam-Cci, Paris / Bibliothèque Kandinsky / Photo Didier L’Honorey.

Claude Viallat

Né en 1936 à Nîmes, Claude Viallat étudie à l’École des beaux-arts de Montpellier et à l’École des beaux-arts de Paris.

Depuis 1966, il utilise un procédé de peinture à base d’empreintes sur toiles sans châssis, créant une forme neutre répétée indéfiniment. Cela lui permet de faire de la couleur à la fois le sujet et l’objet de son œuvre, tout en jouant avec les rapports de densité, d’intensité et de brillance entre les surfaces colorées.

Il expose au Centre Pompidou en 1982, puis à la Biennale de Venise, en 1988, et rencontre un succès grandissant. Claude Viallat est représenté par de nombreuses galeries en France et à l’international : Galerie Templon (Paris), Galerie Ceysson & Bénétière (Luxembourg), Galerie From Point to Point (Nîmes), Galerie Oniris (Rennes), Galerie Hélène Trintignan (Montpellier), et Gallery Itsutsuji (Japon).


Jean-Michel Alberola, Projet pour les vitraux de la cathédrale de Nevers, 1992. Centre Pompidou, Mnam-Cci, Paris / Bibliothèque Kandinsky / Photo Didier L’Honorey.

Présentation des vitraux de la cathédrale de Saint-Cyr et Sainte-Julitte à Nevers par Jean-Michel Alberola, Gottfried Honegger, François Rouan et Claude Viallat

 « Voici quelques exemples de travaux qui ont pu être exposés par la galerie :
[…] c
ommande de l’Etat pour le renouvellement des vitraux de la cathédrale de Nevers,
qui a demandé plusieurs années de réalisation, et n’est pas encore achevé.
Il s’agit de quatre artistes importants : Alberola, Honegger, Rouan et Viallat ».
Germaine de Liencourt, « Les dix ans de la Galerie Saint-Séverin »,
Les Chroniques d’art sacré, hiver 2000, n°64, p. 28.

Le point de vue de Gottfried Honegger

« Lors d’une réunion du Comité National d’Art Sacré, et à la suite d’une rencontre à la cathédrale de Nevers à propos des projets de vitraux, Gottfried Honegger a été invité à s’exprimer librement sur les problèmes qui le préoccupent, en particulier la commande dans l’Eglise. Les problèmes pour Gottfried sont tellement nombreux qu’ils se bousculent un peu entre eux. Il ne fait que les énumérer. Chacun mériterait une réflexion développée. Sans être tout à fait d’accord sur certains points, l’essentiel nous a paru très intéressant. 

Quels sont les problèmes qui vous préoccupent actuellement ?
GH — L’art est une information existentielle pour l’homme. Dès le début de son évolution, l’homme a utilisé l’art comme moyen de communication. Les signes dans les grottes en sont de l’histoire de l’homme. L’art est universel. L’art englobe tous les problèmes de l’homme. On doit apprendre à déchiffrer ce langage muet. Apprendre une langue quelle qu’elle soit demande un effort, aujourd’hui nous ne sommes plus prêts à l’assumer et, en plus, nos écoles ignorent l’éducation esthétique. Pour cette raison, l’art de notre temps est aujourd’hui mal compris on ne le prend pas au sérieux ; « en froid » l’art moderne est avec le public. 

Parler d’art sacré est un pléonasme, l’art est sacré par définition. Les dictateurs de tous les bords — Staline et Hitler — ont compris l’impact politique de l’art ; l’art est un libérateur, l’art est une lumière dans un monde sombre, l’art nous apprend à voir d’une façon critique et indépendante. 

[…] La commande des vitraux dans la cathédrale de Nevers illustre à quel point on a perdu la faculté d’établir un cahier des charges qui ne contient pas seulement des explications techniques, mais aussi un contenu éthique.

Pendant dix ans, il y avait un ballet d’artistes, on en avait d’abord invité une vingtaine pour réduire ensuite à huit, pour arriver à deux et pour revenir enfin, à cinq ou six. Si le mandataire n’a pas une vision claire et ne voit pas le contenu de l’information artistique, on arrive à ce gaspillage de temps et d’argent. On a choisi tel ou tel artiste pour sa renommée. C’est souvent le hasard qui est à la source des décisions. […]

Aujourd’ hui, nous sommes condamnés à la liberté, il n’y a plus de filets idéologiques ; la liberté est notre défi, nous devons apprendre à utiliser et vivre avec la liberté ; la liberté est le contraire d’un style; la liberté est l’image de la démocratie ouverte ; l’immense diversité des images de l’art n’est pas un signe du chaos, c’est plutôt le respect de l’individu. Cette pluralité nous oblige à sélectionner sans préalable, avec de la tolérance et beaucoup d’expérience. Cette pluralité est une richesse -c’est la retombée de la démocratie – dans ce sens, l’art est un sismographe qui enregistre les hauts et les bas, les maladies et la santé d’une société. C’est à travers l’art que nous jugeons les civilisations. Il faut aujourd’hui comme pour préserver la nature une écologie esthétique. […]

Le culte du passé est un signe de résignation, on doit vivre avec le passé et pas dans le passé. Le drame actuel consiste justement à s’orienter résolument vers l’histoire afin d’éviter la difficulté du choix. C’est ainsi qu’il convient de mettre du plomb dans les vitraux. F. Léger n’a pas utilisé le plomb pour ses travaux d’Audincourt, mais du béton … A propos de mes vitraux, on a pu entendre cette remarque : « Cela ne vaut pas l’esprit de Chartres ! » Hélas ! Malgré tout, je suis fier de mon époque, je n’aimerais pas vivre dans le passé et j’ai envie de trouver des signes qui témoignent de l’énorme progrès de notre société. »
Gottfried Honegger, « Gottfried Honegger », Chroniques d’art sacré, n°25, printemps 1991, p.1-5.

 

 

Légende de la photo : Gottfried Honegger, Projet pour les vitraux de la cathédrale de Nevers, 1992. Centre Pompidou, Mnam-Cci, Paris / Bibliothèque Kandinsky / Photo Didier L’Honorey.