Exposition visible jour et nuit, 24h/24 et 7j/7, du 17 juillet au 4 septembre 2006, à la Galerie Saint-Séverin. La visite est totalement gratuite.

L’artiste, Mounir Fatmi 

Mounir Fatmi est né à Tanger au Maroc, en 1970. Il étudie les beaux-arts entre Rome, Casablanca et Amsterdam.

Il développe une réflexion sur le statut de l’oeuvre d’art entre archive et archéologie. Il utilise des matériaux pauvres tels que câbles d’antenne, machines à écrire, ou cassettes VHS, et travaille sur la notion d’une archéologie expérimentale en examinant le rôle de l’artiste au sein d’une société en crise. Il joue des codes et préceptes de cette dernière sous le prisme de la relation entre Langage, Architecture et Machine. Il interroge ainsi les limites de la mémoire, du langage et de la communication, tout en réfléchissant sur les matériaux en cours d’obsolescence et à leurs avenir incertains. Il faut voir ainsi dans ses oeuvres, de futures archives de médias en construction.

Depuis 2000, les installation de Mounir Fatmi ont été sélectionnées dans plusieurs biennales. Son travail a été présenté au sein de nombreuses expositions personnelles, au Migros Museum für Gegenwarskunst, Zürich. Mamco, Genève. Musée Picasso, la guerre et la paix, Vallauris. Fondation AK Bank, d’Istanbul. Museum Kunst Palast, Düsseldorf et au Goteborg Konsthall. Il a participé à plusieurs expositions collections au Centre Georges Pompidou, Paris. Brooklyn Museum, New York. Palais de Tokyo, Paris. MAXXI, Rome. Mori Art Museum, Tokyoo. MMOMA, Moscou. Mathaf, Doha. Hayward Gallery et Victoria & Albert Museum, Londres.
Texte de Mounir Fatmi.

Plus d’informations sur la vie et l’oeuvre de Mounir Fatmi sont disponibles sur le site de l’artiste.


Mounir Fatmi, Les 99 noms de Dieu, détail, 2006, Galerie Saint Séverin, Paris. Courtesy de l’artist et de Lawrie Shabibi, Dubai.

Les 99 noms de Dieu par Mounir Fatmi
Le point de vue de l’artiste

L’art musulman n’a produit aucune image de Dieu, la religion interdisant sa représentation. Il est évoqué dans le Coran par 99 noms tels le Superbe, le Créateur, le Formateur ou le Tout et Très Contraignant. Dans cette proposition, le public se trouve confronté à ces noms écrits sur des badges de conférence. Ainsi c’est malgré tout à travers une image que chaque spectateur s’imagine intérieurement Dieu. La richesse par rapport à l’image qui aurait pu être montrée ne fait pas de doute.

Chacun alors s’imagine Dieu différemment.
Même indéchiffrable l’écrit garde ainsi sa valeur sacrée, et fait danser le corps de ses lettres sur un mur de silence où s’inscrivent les quatre-vingt-dix-neuf noms d’Allah (les bédouins disent que seul le chameau détient le nom du centième). En tant qu’artiste, j’appuie en même temps sur la perte d’orientation du religieux qui passe par la question particulière de la Qibla (direction de la Mecque) et sur la perte d’un centre en général.
Mounir Fatmi – 1999.

 

Le point de vue du commissaire

La question des noms du divin est commune à la plupart des religions. Pour les chinois le mot Dao est le pseudonyme de l’ineffable. Lao Zi écrit : » Voie qu’on énonce n’est pas la voie – nom qu’on prononce n’est pas le nom ». Cette attitude se retrouve dans le judaïsme ou le nom de Dieu révélé à Moïse était prononcé une fois, lors du nouvel an par le grand prêtre et ne l’est plus depuis la destruction du Temple. Chez les auteurs chrétiens, la méditation sur les noms divins dit quelque chose de l’être de Dieu tandis que pour L’Islam les noms de Dieu renvoient à des attributs mais la réalité même de Dieu est indicible. L’attention portée par toutes les grandes mystiques à cette question pose la question de notre Relation avec Dieu, lien si intime qu’il touche à la sanctification ou à la profanation de son Nom par nos actes.

Dans le Coran, un mot sur vingt environ fait mention expresse de Dieu par l’un de ses noms. On n’oublie jamais Celui à qui revient la soumission (islâm) de tout. L’œuvre de Mounir Fatmi fait allusion au fait que ces noms sont arborés par les musulmans qui les portent sous la forme connue : àbd al Qâdir (Serviteur du Puissant) ou Abdallah= Àbd Allâh (Serviteur de Dieu). Dans le monde d’aujourd’hui on peut imaginer une conférence, ou chacun, « badgé » participerait à l’énonciation des 99 Noms. Ainsi l’artiste, pose à la fois la question de notre responsabilité à l’égard de ces Saints Noms et l’ambiguïté de leur apparition dans notre univers moderne.
Jean de Loisy, commissaire – 2006.

 

Direction : Isabelle Renaud-Chamska
Commissariat : Jean de Loisy
Presse : Catherine Orphelin

Légende de la photo : Mounir Fatmi, Les 99 noms de Dieu, installation, 2006, Galerie Saint Séverin, Paris. Courtesy de l’artist et de Lawrie Shabibi, Dubai.